Immigration

Face aux expulsions, l’union fait la force

Jean est arrivé en France en 2011 avec une autorisation de séjour. Aujourd’hui divorcé, la préfecture refuse de lui renouveler sa carte et lui demande de quitter le territoire. Une situation incompréhensible pour Clémentine et l’ensemble de ses proches qui ont lancé une pétition pour le soutenir. Clémentine nous raconte leur combat pour que Jean soit régularisé.

Pourquoi avoir lancé une pétition ? 

Nous sommes plusieurs amis proches de Jean à suivre son dossier depuis un moment, nous l’avons accompagné dans toutes les démarches nécessaires avec son avocat recommandé par la Cimade pour l’obtention d’un titre de séjour, sans succès. Le 16 octobre dernier avec cet énième refus de titre de séjour, la situation de Jean s’est corsée. Il fallait agir. Lorsque Jean a reçu cette dernière OQTF (Obligation de quitter le territoire) avec confiscation de son passeport sénégalais, nous ne nous sommes pas posés la question. Jean devenait du jour au lendemain « expulsable » et il était alors primordial d’alerter un maximum de personnes pour faire poids et montrer notre détermination aux services de la Préfecture de Toulouse qui n’ont jamais rien voulu entendre du cas particulier de Jean. Voilà pourquoi cette pétition est devenue centrale et nécessaire.

Que demandez-vous exactement ?

Nous demandons le réexamen de son dossier et sa régularisation. Il remplit toutes les conditions des critères ministériels exigés par la circulaire Valls de novembre 2012 pour une régularisation par le travail. Une promesse d’embauche en CDI dans un EHPAD de Toulouse l’attend. La directrice de l’EPHAD était présente, à nos côtés, lors du premier rassemblement pour Jean devant la Préfecture le 18 octobre dernier. Elle ne comprend absolument pas la situation : elle confirme que Jean est professionnel et mérite cet emploi.

Comment expliquez-vous qu’il soit si compliqué pour Jean d’obtenir sa régularisation ?

Je pense que l’examen des dossiers à la Préfecture de Toulouse ne tient plus compte du cas par cas. Leur objectif est d’expulser un maximum de migrants pour répondre sans doute à des quotas. Sinon, comment comprendre alors qu’à plusieurs moments Jean aurait dû être régularisé, il ne l’a pas été faute d’informations fiables de la part des services de l’Etat.  Nous ne pouvons pas croire que son dossier ait vraiment été étudié de près. Outre les conditions remplies par Jean en termes d’ancienneté sur le territoire – 5 ans, de demande en bonne et due forme de titre de séjour salarié, d’entrée légale sur le territoire en 2011 lorsqu’il était marié à une française, Jean avait aussi, il y a deux ans, fait une demande de titre de séjour en tant qu’étranger malade. En effet, lors de son arrivée en France, Jean a découvert qu’il avait une pathologie cardiaque et a dû être opéré du cœur assez rapidement. Il devra subir une deuxième opération dans quelques années. A ce titre, il avait fait une demande d’étranger malade auprès de la Préfecture. Le médecin de la préfecture a refusé ce titre là, en précisant que l’opération pouvait être réalisée dans l’hôpital Fann de Dakar, unique hôpital du Sénégal à réaliser cette opération délicate. Personne n’a jamais pris en considération, au sein des équipes de la Préfecture, que même si cette opération était « réalisable » au Sénégal, Jean ne pourrait jamais y avoir accès financièrement. Rappelons qu’il n’y a aucune couverture santé au Sénégal et que le salaire moyen mensuel si l’on occupe un travail « formel » à temps plein n’est que de 70 euros par mois.

Pensez-vous que la mobilisation citoyenne a été utile à votre combat ? Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Nous en sommes à plus de 46 300 signatures à l’heure de cette interview et il est évident que la mobilisation citoyenne est primordiale dans ce combat mené pour Jean. Les autorités ne semblent pas donner de nouvelles depuis notre dernier rassemblement du 18 octobre. Nous en organiserons donc un nouveau, le jeudi 24 novembre prochain à 17h30 devant la Préfecture de Toulouse, place Saint Etienne. Les signataires toulousains ou de la région sont invités à ce rassemblement si leur emploi du temps le leur permet. Nous demanderons de nouveau à être reçu par la Préfecture et leur apporterons la pétition riche de ces milliers de signatures et de messages de soutien, si forts et si justes. Nous tiendrons chacun une bougie synonyme de toutes ces personnes qui ont signé la pétition, qui « veillent » sur le dossier de Jean.

Quel message voulez-vous envoyer aux décideurs politiques sur l’obtention des titres de séjour ? Aux familles concernées ?

Nous leur demandons de considérer la situation personnelle des demandeurs et de ne pas simplement refuser les demandes au regard des quotas d’expulsion. Jean est un homme honnête, travailleur, intégré en France. Il doit pouvoir obtenir son titre de séjour salarié. Sa place est ici.

Auriez-vous un conseil à donner aux personnes qui souhaiteraient lancer une pétition ?

Tout d’abord se lancer, soigner le texte de la pétition, y adjoindre une photo forte représentant le combat en question et penser à donner des nouvelles à leurs signataires régulièrement. Rien n’est jamais perdu tant que l’on n’a pas tenté !

Premier rassemblement de soutien à Jean

Written by
Aminata Dembele
novembre 10, 2016 9:28